Un article à lire dans Lutte Ouvrière n°2402 du 15 août 2014
Dans les entreprises
Le 31 juillet dernier, le secrétaire de la CGT de l'usine Snecma de
Gennevilliers recevait de la direction une lettre recommandée où il
était reproché au syndicat d'avoir appelé à manifester le
mercredi 23 juillet en solidarité avec le peuple palestinien. Cet appel
du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens
et Israéliens réclamait entre autres « l'arrêt immédiat
des bombardements sur Gaza, l'arrêt de l'agression israélienne en
Cisjordanie et Jérusalem, la levée du blocus, illégal et criminel sur
Gaza ». L'appel avait d'ailleurs été relayé par la confédération
CGT.
Dans son courrier, la direction se permettait de donner une leçon de
droit syndical en décrétant que « l'objet social (d'un syndicat) est la
défense des droits et intérêts des salariés », « qu'une
organisation syndicale n'a pas vocation à exprimer des revendications de
nature politique, et encore moins lorsque celles-ci ont trait à des
questions de politique internationale ». Pour le couplet
moralisateur, elle estimait tout bonnement « inacceptable, voire
irresponsable, que l'organisation syndicale (...) se soit rendue
coupable de prosélytisme à caractère politique dans l'enceinte même de
cet établissement ». Et, pour ponctuer son réquisitoire, la direction,
menaçante, s'engageait à prendre « les mesures qui s'imposent » si la
CGT récidivait.
Que la direction ose menacer de sanctions un syndicat qui appelait à
manifester sa solidarité avec un peuple meurtri, cela montre bien de
quel côté elle se trouve : du côté des oppresseurs.
Quant au verbiage sur les domaines d'intervention d'un syndicat, ce
n'est pas à la direction de dicter sa loi. Quand les syndicats se
battent contre le blocage des salaires, se battent pour
empêcher les licenciements où préserver les acquis sociaux, ils
combattent aussi les gouvernements qui mettent en place ces politiques.
Devront-ils demain s'empêcher de dénoncer la politique
antiouvrière de Hollande/Valls sous prétexte qu'on basculerait alors
dans le domaine politique ?
Pour ce qui est de la solidarité internationale, la direction semble
découvrir qu'elle puisse exister. Elle est pourtant inscrite dans
l'article 15 des statuts de la CGT, où il est écrit que le
syndicat exerce son activité « en développant la solidarité
internationale et la défense des intérêts communs à tous les salariés du
monde ». Cette solidarité, la CGT l'a exprimée dans le passé pour
dénoncer l'apartheid ou plus récemment pour exprimer son soutien aux
travailleurs tunisiens ou égyptiens lors du Printemps arabe.
Face à ce qu'elle considère comme une provocation, la CGT n'a pas
l'intention de laisser fouler aux pieds la liberté d'expression.
Correspondant LO