Hollande a donc la
majorité parlementaire qu’il voulait. Le Parti socialiste a même, à lui
seul, la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Entre la présidence
de la République, le gouvernement, l’Assemblée nationale et le Sénat, il
a donc la totalité des pouvoirs politiques dans le cadre des
institutions.
Les travailleurs n’ont pourtant pas à se faire d’illusions.
La gauche ne se servira pas de ce pouvoir pour protéger les
travailleurs, les salariés, les couches populaires, dans cette période
de crise. Avec la fin de la campagne électorale, s’achève même le temps
des quelques gestes symboliques qui ont précédé le deuxième tour des
législatives.
Non seulement le futur gouvernement laissera les mains totalement
libres au grand patronat pour licencier, pour fermer des entreprises
considérées comme non rentables, pour abaisser les salaires, mais il
prendra lui-même des mesures d’austérité qui, même décidées par la
gauche, viseront les classes populaires tout autant que les mesures
d’austérité de la droite.
Il ne peut pas en être autrement dans le cadre des institutions
étatiques qui sont en place pour servir les intérêts de la bourgeoisie
et avant tout de ses couches les plus riches.
Dans cette période de crise de l’économie capitaliste, plus que
jamais les intérêts des exploiteurs capitalistes et ceux des salariés
exploités sont totalement opposés. Préserver les profits, les revenus du
capital, c’est aggraver les conditions d’existence des salariés.
Cette aggravation n’est cependant pas une fatalité. La classe
ouvrière a les moyens de s’y opposer par ses luttes collectives. Ces
luttes que l’avidité du grand patronat finira par déclencher ne pourront
être pleinement efficaces que si les travailleurs prennent conscience
que leurs intérêts s’opposent complètement à ceux de la grande
bourgeoisie. Ils ont le droit de mettre en avant les objectifs
indispensables pour préserver leur emploi et le pouvoir d’achat de leur
salaire, leur seul moyen d’existence, quoi qu’en disent les hommes
politiques qui servent l’ordre capitaliste.
Pour résorber le chômage, il faut imposer la répartition du travail
entre tous sans diminution de salaire et l’interdiction des
licenciements collectifs. Pour préserver le pouvoir d’achat, il faut
l’indexation automatique des salaires et des retraites sur les prix,
l’échelle mobile des salaires.
Les élections terminées, ces objectifs vitaux restent à imposer. Ils
sont incontournables pour empêcher le grand patronat et les banquiers,
avec la collaboration du gouvernement, de pousser vers la pauvreté une
partie croissante de la classe sociale dont le travail fait tourner
l’économie. À la bourgeoisie et à ses porte-parole politiques qui, de la
droite à la gauche, invoquent le manque de moyens du fait de la crise
ou le montant de la dette publique, il faut opposer l’exigence de rendre
publics et contrôlables les comptes de toutes les entreprises, de
toutes les banques. Seule la fin du secret des affaires pourrait
dévoiler clairement que les licenciements, les sacrifices sur les
salaires et les retraites, ne sont pas inévitables. Pas plus que ne sont
inévitables les coupes claires dans les dépenses des services publics
les plus indispensables aux classes populaires. Ils résultent du choix
de privilégier les revenus du capital au détriment des travailleurs et
de l’intérêt de la collectivité.
Lutte Ouvrière n’a pas besoin de députés pour continuer à agir dans
les entreprises, dans les quartiers populaires, afin de propager ce
programme de lutte et cette conscience de classe. Elle continuera à
œuvrer pour la construction d’un parti représentant les intérêts
matériels et politiques de la classe ouvrière, un parti qui ne cherche
pas à s’intégrer dans les institutions politiques de la bourgeoisie mais
qui les combatte, avec pour objectif le renversement du pouvoir de la
bourgeoisie et son expropriation.
Pour Lutte Ouvrière, Nathalie ARTHAUD